On ne saurait réduire la question de l'identité aux seuls problèmes des identités nationale, de classe, de genre, de race... À un moment où les revendications identitaires sont légion, il faut revenir en amont d'une tendance courante qui galvaude un concept initialement philosophique pour le mobiliser sur le seul terrain idéologique et politique. Qui suis-je ? Aucune discipline scientifique n'oserait à elle seule penser, affronter et circonscrire cette vieille question métaphysique... et enfantine. En mettant en oeuvre une interdisciplinarité effective, les auteurs ont ici pour ambition d'éclairer cette énigme de l'identité personnelle. L'identité fait l'objet de réflexions plus ou moins rigoureuses dans différents contextes : philosophique, juridique, administratif, social, politique ou encore scientifique. Chacun des domaines a pu prendre position par le passé sur ce qui « constituerait » l'identité. Pensée comme individuelle, l'identité serait tour à tour personnelle, psychologique, sexuelle, génétique, narrative voire imaginaire ; pensée comme collective, elle serait sociale, ethnique, générationnelle, familiale, genrée, linguistique ou encore nationale. Leur constat s'est révélé bien différent : on ne peut penser l'identité à travers un seul prisme, une seule pensée, un seul regard disciplinaire. Définir et comprendre l'identité, nos identités, nécessite de faire des ponts entre ces différents domaines et peut-être aussi de voir leurs incompatibilités ou incohérences. En les ayant ainsi rassemblés, ce collectif espère que ces différents regards portés sur l'identité permettront au lecteur de se faire son propre chemin dans les méandres de cette notion afin, peut-être, d'acquérir une autonomie de pensée sur la question.
«Nous persistons à croire que, tout au moins dans le contexte de notre culture européenne où nous nous sommes fait une certaine image de la philosophie et où nous avons même créé le concept de son devenir, une histoire de la philosophie est utile. Nous ne le dirions pas, du même point de vue, pour une discipline non littéraire ; nous le dirions de moins en moins si nous considérions les progrès de plus en plus récents de cette discipline.L'histoire que nous présentons ici n'est pas orientée. Pour lui donner un sens, et un seul, il eût fallu la rédiger seul, ou selon la philosophie de l'histoire propre à une Église ou à un parti. [...] on trouvera ici une suite chronologique d'informations. Il arrivera que cette suite ne soit pas exactement respectée : on lira des répétitions apparentes (mais en des sens qui n'auront rien de répétitif), on notera des débordements de dates (mais, chaque fois, pour élargir des horizons qui eussent été trop restreints). Monographies ? Du moins avons-nous voulu que chacun y pût trouver, à volonté, l'information qui lui permît d'orienter l'histoire de la philosophie dans le sens de son Église, de son parti, - et même de son libre choix.Yvon Belaval.